Ghost
calls to visit with my keys in his pocket / Kisses in my mouth with his eyes
hanging out of his sockets / My memories crumble under still resistance
Jeff
Buckley - I Woke up in a Strange Place (MP3)
...
Je me retourne sur mon oreiller en vérifiant l'heure sur mon
téléphone qui indiquait six heures. J'ai clos les yeux dans l'ultime tentative
de reconquérir le fils de la nuit pour me conforter des dépites de mes journées
ou des consignes de leurs jouissances avant de renouer avec la persuasion
odieuse, je veux dire l'hostilité de la réalité, ce matin-là, j'étais sûr que la
réalité était beaucoup moins vindicative que mon cauchemar. Le bruit
causé par les pas, reprends dans le couloir, cette fois-ci on a frôlé ma porte.
Je me suis dit que c'est sûrement le veilleur de nuit qui fait son dernier tour
des couloirs avant de vaquer à son sommeil tardif.
Je me lève et j’entrebâille la porte : R.A.S. Le couloir est
bien vide et silencieux, mais comme je tenais à ma primordiale sérénité et à ce
sommeil tant alterné tantôt par mes cauchemars et tantôt par des mouvements
produisant des bruissements dans un couloir vide, je me suis dit que j’ai été
victime d’une erreur de mes sensations, la sapidité picrate embaumait toujours
mon souffle, j’avalais malaisément ma salive et ça traduit tout.
Languissant et toujours traînant des pieds, je m’approche de
cette fenêtre large, convenablement élevée et nimbée de volets pour jeter un
coup d’œil avant de reconquérir mon lit. Devant ma grande stupéfaction que j’ai
failli crouler d’épouvante. Éberlué et yeux écarquillaient dans cet abîme où le
milieu avait complètement changé, comme si, pendant la nuit un ingénieux
sorcier était venu me mouvoir d’un lit d’hôtel à Bejaia vers un autre à Alger.
Ce n’était plus la vue sur le port de Bejaia que j’avais devant les yeux, mais
plutôt le quai sud d’Alger où je peux distinguer d’ici Tarik qui a l’air de
quitter la rade pour regagner son quai usuel.
Et demeuré là, figé, hébété, à considérer intensément les
premières lueurs d’un nouveau jour se lever sur un décor inattendu. Était-ce, juste,
des allégories, d’un lieu venant tout juste de mon cauchemar, qui se sont
estompés pour disparaître si vite et laisser place à la réalité ? sinon,
pourquoi ai-je pris une chambre d’hôtel ?
Fallait-il y arriver, je m’arrache de ma stupeur pour me
diriger vers la salle de bain, une bonne douche était de rigueur avant de m’apercevoir
une fois en face de la glace que j’étais dans le costume d’Adam, dans le plus
simple appareil, in naturalibus. Rapidement je me suis habillé derrière le
paravent, même pas pensé de fermer la fenêtre tant j’étais pressé de me rendre
à la réception pour m’enquérir de mon arrivée à cet hôtel. Après avoir posé ma
rafale de questions empressées, comme je m’oublie souvent de le faire : Que, qui
quel, quand, combien, comment, où, pourquoi… J’ai fini juste et difficilement
par comprendre de lui que j’étais débarqué à cet hôtel la vielle avant de
sortir avec une belle femme logée a trois portes plus loin que la mienne, au
retour, elle m’accotait tant j’étais mal au point. En me décidant de sortir de
cet hôtel qui semble dormir encore, j’aperçois au bas de l’escalier qui conduit
vers la sortie, une ombre qui s’empressait de refermer la porte derrière elle,
même si je ne l’ai vue que de dos, elle me paraissait familière. Sans réfléchir,
je me suis lancé à sa traque. Dehors, la rue était dépeuplée, Alger semblait
dormir encore, car assurément c’était un jour de fin de semaine, je remonte la
rue Larbi Ben M’hidi puis la rue Abane Ramdane en traversant par la rue Tanger.
Nulle part je rejoignais indice de la fuyarde quand haletant je finis par m’arrêter,
m’attablé dans un coin du grand Tonton Ville, la cigarette avait un si bon goût
avec ce café matinal que je m’en délectais tout en furetant curieusement des
yeux autour de moi le remous pittoresque de la ville. Parmi toutes ces
trombines qui surgissaient, tantôt par ci, tantôt, par-là, vacantes à leurs
servitudes. Nulle ne m’évoquait la silhouette pourchassée et puis n’est-ce,
vraiment, Wassila ? Il me semblait avoir vu sa petite chevelure blonde quoique
la distance ne fût pas grande, mais c’est le bas de l’escalier qui était
sombre. Mais qu’est-ce qui me fait dire que c’était elle ? Oui, la
fragrance que j’avais inhalée en descendant de l’escalier avait bien stimulé la
révélation de mes narines.
…
Le destin ira chercher ton amour dans une coupe de champagne : Jeff Buckley – I Woke up In a
Stranger Place
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